Dimanche 10 mai

Un lecteur avisé de l’évangile de Jean ne doit jamais perdre de vue que ce récit est tardif et qu’il n’est finalisé qu’aux alentours de l’an 100, vraisemblablement après la mort de Jean lui même. Sa rédaction mêle donc tout ensemble ce qui est d’ordre historique, factuel, et ce qui appartient davantage à l’expérience croyante de son auteur, plus subjectif dirions nous aujourd’hui, mais c’est bien ce tout qui est pour nous Parole Vivante.
Dans ce récit très narratif, très écrit, les nombreux dialogues se développent presque toujours sur un mode de malentendu. Il y a comme un fossé entre ce que Jésus exprime, et ce que l’interlocuteur comprend, et bien loin d’aplanir le différend on peut souvent mesurer qu’au contraire il grandit en même temps que le dialogue s’avance. Si vous ne voulez qu’un seul exemple de cela pensez à Nicodème dont la rencontre nocturne avec Jésus tourne court, avec un dialogue devenu monologue, et un interlocuteur évanouit dans l’obscurité.
Le chapitre 14 qui nous occupe ce dimanche met aux prises les disciples avec l’annonce faite par Jésus de son départ prochain, mais les choses ne semblent pas vraiment claires.
Est-ce les apôtres qui comprennent mal ? Est ce Jésus qui s’exprime de manière trop peu lisible ? Est-ce Jean lui même qui, au terme de sa vie, se pose avec profondeur et inquiétude la question du sens de sa foi ?
A entendre Thomas rien ne semble en tous cas vraiment pouvoir s’imposer d’évidence même quand Jésus est là, bien présent. « Seigneur nous ne savons même pas où tu vas, comment pourrions nous savoir le chemin ? » Pour ma part je suis toujours un peu étonné quand j’entends des croyants d’aujourd’hui se débarrasser au nom de leur foi, disent t’ils, des questions lancinantes de notre condition humaine, comme la peur de la mort, l’incompréhension de voir partir celles et ceux qu’on aime. Je suis heureux finalement que Thomas ait pu « tenir » tête. Tout comme lui je me sens invité à me mettre en chemin à la suite de Jésus, mais il n’empêche que certains jours j’apprécierai d’avoir quelques renseignements sur la topographie de l’étape à venir, quelques assurances aussi, mais fondamentalement je ne sais pas, alors j’ose la confiance, à chaque jour de mon mieux.
Philippe lui est encore plus pragmatique et verrait bien d’arriver au but en évitant les détours inutiles : « Montre nous le Père et cela nous suffit. »
Pas sur que l’invitation de Jésus à faire les mêmes œuvres que Lui : « Celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais » l’ait pleinement mis à l’aise. Pour moi en tous cas je me dis que la marche est un peu haute et que je n’en demande pas forcément autant.
Disons juste quelques « œuvres », pas trop onéreuses, contre l’assurance du but, est ce que cela pourrait convenir ?
Beaucoup de nos prières empruntent parfois ce chemin du « donnant-donnant » et ce n’est peut-être pas un si mauvais point de départ. Dieu fait grand en nous si nous ne trichons pas avec ce que nous sommes : des hommes et des femmes aux prises avec bien des contradictions, visités par bien des peurs, mais toujours capables de mouvement, capables d’aimer juste un peu plus loin que notre toute petite personne.
Qui ne pourrait mesurer dans les temps que nous vivons, jusqu’à quel point un appel aussi humble peut-être porteur de Vie ?
Que ton amour Seigneur soit sur nous et qu’il nous conduise jour après jour à aimer. Amen.
Mathias

Un message, un commentaire ?

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.